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O.N.G. - Extrême-orient(é)
16 octobre 2014

La Chine en quête d’énergie

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Soucieuse de sécuriser ses sources d’approvisionnement énergétique et de maintenir sa formidable croissance économique, la Chine multiplie les partenariats dans le monde. La politique qu’elle a engagée en Afrique subsaharienne est à cet égard exemplaire. D’autant qu’elle est exempte du colonialisme idéologique et moral que les Africains reprochent généralement à l’Occident. Cette projection se fait aussi en Asie centrale et en Amérique latine. Toute l’histoire de la Chine est ponctuée, en plus des catastrophes naturelles (inondations, séismes…) de famines dramatiques. On peut même affirmer que l’enjeu alimentaire est, avec la gestion de l’eau, la raison d’être essentielle d’une bureaucratie forte et de collectivisations agraires récurrentes sous les empereurs comme sous le régime communisme. Cette constante s’exprime aujourd’hui sous la forme d’un besoin de plus en plus grand en énergie et en matières premières, résultant d’une croissance économique forte. En s’installant au Moyen-Orient, réservoir pétrolier de la planète, les États-Unis sont en train de contrôler la dépendance énergétique de la Chine. Pékin doit donc diversifier ses approvisionnements.

C’est le sens des rapprochements que les Chinois tentent avec la Russie (en concurrence avec le Japon), l’Iran, l’Arabie Saoudite, le Venezuela ou des pays africains du golfe de Guinée. De même vont-ils chercher dans le partenariat avec le Brésil une coopération nucléaire, ou, dans celui avec le Chili, le cuivre indispensable à leur industrie électronique. L’Afrique est devenue une direction essentielle dans la projection mondiale de la Chine. Les Chinois, au moins depuis le début des années 2000, développent des partenariats économiques et politiques avec de nombreux États d’Afrique noire. La Chine est le troisième partenaire commercial de l’Afrique derrière les États-Unis et la France. C’est non seulement l’or noir qui intéresse les Chinois (au Nigeria, en Angola, en Guinée Équatoriale, au Congo-Brazzaville, au Gabon, au Soudan), mais aussi la construction, l’exploitation des minerais, du bois précieux, les terres agricoles, les réseaux de télécommunications…

En novembre 2006, puis en novembre 2009, à l’occasion de sommets de grande ampleur, les dirigeants de quarante-huit, puis quarante-neuf pays africains se sont rendus à Pékin et à Charm El-Cheikh. La Chine est en train de prendre en main le développement de l’Afrique subsaharienne, dans une logique qui présente parfois des traits similaires à la colonisation (l’envoi en masse d’ingénieurs, de contremaîtres), mais qui se distingue en même temps fortement d’un néocolonialisme « donneur de leçons » propre à l’Occident et que ne supportent plus ni les Chinois ni les Africains.

INSTITUTS CONFUCIUS EN AFRIQUE

À la différence des aides américaine ou française, l’aide chinoise au développement n’est pas conditionnée politiquement (à la démocratie et au respect des droits de l’homme) ; la seule exigence de Pékin auprès des Africains est de ne pas reconnaître Taïwan en tant qu’État souverain. En Afrique, la Chine déploie sa vision des relations internationales fondée sur le respect des souverainetés étatiques et le refus de l’ingérence. Son objectif est de constituer à l’ONU un puissant groupe de pays lui étant favorables, au sein duquel se trouveraient de nombreux pays africains, ainsi que quelques pays d’Amérique latine. Pour les Chinois, le continent africain est à la fois un réservoir pétrolier, une zone d’influence (les instituts Confucius vont faire du chinois une langue répandue parmi les élites africaines), un réservoir de soutiens politiques pour l’ONU, un débouché pour les produits chinois… Les investissements directs chinois en Afrique sont passés de 491 millions de dollars en 2003 à 7,8 milliards fin 2008. Les échanges commerciaux entre la Chine et l’Afrique ont été multipliés par 10 entre 2000 et 2008 (106,8 milliards de dollars).

DÉPENDANCE PÉTROLIÈRE

Chaque année, depuis le début des années 2000, la croissance de la consommation de pétrole brut de la Chine dépasse les 10 % (chiffre proche de sa croissance économique). Si l’Amérique absorbe le quart du pétrole consommé mondialement, la Chine en consommait 10 % en 2010. La Chine est devenue importatrice de pétrole en 1993. Ses importations représentent plus de 35 % de ses besoins, cette proportion ne faisant qu’augmenter : en 2030, la Chine devrait importer 60 % de son pétrole, dont plus des 2/3 viendront du Moyen-Orient : elle devra donc avoir accès à l’Arabie Saoudite, à l’Iran, à l’Irak… C’est pourquoi la politique américaine de contrôle des grandes zones pétrolifères l’inquiète au plus haut point. C’est aussi pourquoi la Russie reste une alternative de premier plan.

Aymeric Chauprade - Chronique du choc des civilisations (édition 2011)

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