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O.N.G. - Extrême-orient(é)
20 janvier 2014

Les fonds de la Cour de justice de l’Indochine

Sans titr

Méconnu, le fonds de la Cour de justice de l’Indochine (Z/7) est une plongée dans la Collaboration, loin de Vichy, avec, en toile de fond, les ambitions du Japon impérial et les expérimentations politiques des administrateurs français.

La sous-série Z/7, contenant 51 articles, constitue le fonds de la Cour de justice de l’Indochine, juridiction d’attribution créée par la loi du 11 mai 1946, sur le modèle des cours de justice métropolitaines de l’ordonnance du 26 juin 1944. Composée d’un magistrat et de quatre jurés, sa compétence s’étend sur les individus suspectés d’avoir eu l’intention de favoriser, en Indochine, les entreprises de l’Allemagne ou de ses alliés, et principalement le Japon, qui obtint du gouverneur Decoux une série de facilités jusqu’à briser la souveraineté française. La Cour est également compétente en matière d’indignité nationale, jugée en chambre civique.

Cette épuration judiciaire parisienne est l’aboutissement de procédures entamées sur place par les commissions d’épuration administrative du ministère de la France d’Outre-mer ou par les tribunaux militaires en cas d’intelligence avec l’ennemi. Le haut-commissaire de France pour l’Indochine, Georges Thierry d’Argenlieu, et la Commission interministérielle d’enquête étaient ensuite saisis des dossiers et effectuaient l’enquête préliminaire devant déterminer l’opportunité du renvoi du dossier devant la Cour de justice.

Dernier fidèle de Pétain, Decoux a créé dans une fédération hétérogène un laboratoire de la Révolution nationale, coupé de l’extérieur. La majorité des accusés s’est rendue coupable d’une démoralisation de la nation et d’avoir ainsi affaibli la défense nationale, principalement par le biais d’une propagande active en faveur de l’Axe. Nombreux sont également les faits de commerce avec l’ennemi pour des entreprises abattues par les pénuries. Néanmoins, la collaboration directe, c’est-à-dire la relation avec un agent des puissances ennemies, demeure assez marginale et relève de l’opportunisme : les dirigeants ont presque tous bénéficié d’un non-lieu.

Outre les pièces d’organisation de la Cour permettant d’en retracer le fonctionnement, le fonds comporte des procédures et des scellés d’une richesse exceptionnelle. Les archives du service de l’Information- Propagande-Presse et les collections de journaux, de brochures et d’affiches font apparaître le façonnement de l’opinion publique. Si la correspondance, la comptabilité des entreprises et les marques d’estime permettent de délimiter le faisceau de relations complexes entretenues avec les Japonais, tous les pans de l’activité de la Légion française des combattants sont également représentés.

L’historiographie, partiale, marquée par les mémoires partisans d’après- guerre, axée sur la Révolution nationale et la question japonaise, pourra être renouvelée sous l’angle d’une épuration jamais évoquée. La propagande, le gouvernement, les réseaux, l’administration ou la dissidence dans ces territoires méritent d’être analysés en relation avec les microfilms de la commission d’enquête (43 Mi) et de l’Indochine sous Vichy (53 Mi) conservés aux Archives nationales et les fonds des Archives nationales de l’outre-mer et des Archives de Paris.

Ce fonds fait aujourd’hui l’objet d’un travail de classement et de description bientôt disponible en salle des inventaires. Il s’inscrit dans la thématique des juridictions d’exception, programme retenu dans le cadre du Projet ccientifique, culturel et éducatif des Archives nationales

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