Arcanes et ravages du tourisme sexuel
Le tribunal correctionnel de Colmar a entendu, hier, Hélène Paillard, membre de l’ECPAT, un réseau international de lutte contre l’exploitation sexuelle des enfants. La jeune femme a apporté un éclairage global sur le procès, expliquant qu’il y avait eu « un déplacement » du tourisme sexuel de la Thaïlande vers le Cambodge après un durcissement de la loi thaïlandaise. Elle a précisé que la loi cambodgienne était aussi sévère, mais que son application était « difficile » au regard de « la corruption et du manque de formation des policiers ». Aujourd’hui, les touristes sexuels préféreraient aller au Cambodge, « ayant moins de risque d’être punis ».
Hélène Paillard a décliné les différentes sortes de touristes sexuels au Cambodge. « Il
y a ceux qui résident plus ou moins sur place et qui font du grooming:
ils vont dans un village, se lient d’amitié avec une famille, proposent
de payer la scolarité ou les soins pour les enfants afin de préparer
petit à petit l’enfant à l’abus sexuel, tout en étant déculpabilisé.
Ceux qui font de courts séjours vont dans des bordels ou avec des
enfants prostitués des rues. C’est l’affaire d’aujourd’hui. ».
La jeune femme a indiqué qu’« il n’y a pas de profil particulier du touriste sexuel. Ce sont des hommes, mais aussi des femmes, de tout milieu, de tout âge ». Elle a ajouté que certains, « les occasionnels », ne voyagent pas pour cela, mais « saisissent une opportunité » et que d’autres, « les préférentiels », voyagent pour le sexe. Ces derniers « échangent beaucoup d’informations et également des films. »
Elle
a repris les justifications les plus courantes des touristes sexuels,
en les démontant, parmi lesquelles le fait d’aider les enfants à se
nourrir : « C’est faux car les enfants ne touchent généralement rien et sinon, ils le dépensent en drogue pour supporter les actes sexuels ».
Quant aux conséquences sur les enfants victimes, elle a cité « les
grossesses et avortements à répétition ; les déchirements anaux et
vaginaux ; le sida ; la dépendance à la drogue fournie parfois par les
trafiquants pour que les enfants ne partent pas, ayant besoin de leur
dose ; l’espérance de vie très faible ; et la déconstruction
psychologique avec la dépréciation de soi et un comportement hyper
sexualisé que certains touristes traduisent comme de la drague. »