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O.N.G. - Extrême-orient(é)
25 janvier 2009

Fleur Noire

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Depuis que le roi Kojong avait décrété, dix ans plus tôt, que les hommes devaient se couper les cheveux, les coiffures courtes étaient à la mode. Le souverain, qui avait dû renoncer à son chignon sous la pression japonaise, avait, pour comble de malheur, au cours de la même année perdu sa reine, tombée sous les coups d'assassins envoyés par son propre père, allié des Japonais. De misérables Japonais avaient brûlé en pleine rue le cadavre de la reine poignardée. Le roi, ayant perdu à la fois les cheveux qu'il laissait pousser depuis sa petite enfance et l'épouse avec laquelle il avait si longtemps vécu, s'était réfugié auprès de la légation russe d'où il avait tenté de restaurer son pouvoir. En vain. Quelques années plus tard, son royaume devenait un empire et lui-même un empereur. Mais un empereur sans aucune autorité. A la même époque, les Etats-Unis d'Amérique gagnaient la guerre contre l'Espagne et mettaient la main sur les Philippines. Les ambitions des grandes puissances occidentales en Asie ne cessaient de croître. L'empereur sans pouvoir avait perdu le sommeil.

Depuis son ouverture, le port de Chemulpo connaissait une animation grandissante grâce à l'afflux des marchandises nouvelles venues du Japon, de Chine et d'Occident. Partout, des enseignes en chinois, en japonais et en anglais témoignaient de son activité florissante de grand port international. Sur les flancs de la colline se dressaient les résidences des Japonais et leur consulat, bâtisse élégante de style Renaissance italienne. Mais l'absence d'arbres sur les collines alentour et sur les îles au large de la ville les faisait ressembler à de vastes amoncellements de tourbe. Malgré leur nombre, les maisons, dont le toit de chaume touchait presque le sol, étaient si basses qu'on les distinguait à peine de loin. Dans les rues, des enfants aux pieds nus suivaient en courant les portefaix coréens au front ceint d'un bandeau blanc.

Un groupe de Japonaises passa en toute hâte devant le consulat. Malgré le soleil printanier, elles marchaient, les yeux fixés au sol.

Fleur Noire de Kim Young-ha

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