Comme les mendiants nourrissent leur vermine

Le bar s'appelle « Les fleurs du mal ». C'est donc sous les auspices de Baudelaire qu'est organisé ce soir un concours de mimes de personnages de dessins animés rythmé par la musique de leurs différents génériques télé et agrémenté de photos de divers mangas projetées sur les murs. Les gens sont très contents, ils rient beaucoup. Ils sont heureux et fiers de connaître par coeur toute la distribution de Capitaine Flam et de Candy... C'est la nouvelle culture populaire. Ils gagnent des shots de vodka qui leur permettent de s'atomiser davantage le crâne et de rire toujours plus en imitant brillamment Ken le survivant ou Princesse Sarah... Il paraît que ce sont « des étudiants qui s'amusent », et il faudrait vraiment être un protestant frustré, un vieux con réac ou une horrible facho aigri pour reprocher aux gens de s'amuser.

A l'extérieur, des bandes de racailles errent et fournissent en drogues diverses et variées les épaves des bars qu'elles dépouilleront un peu plus tard dans la nuit.

Autre estaminet, autre ambiance, cette fois la maison propose à sa clientèle féminine « un verre gratuit » contre un polaroid de leurs seins. A voir le nombre de clichés qui tapissent les murs, cela semble fort bien fonctionner... Cette sympathique et élégante pratique, glorieux aboutissement de 40 ans d'hystérie féministe, fait de l'endroit l'un des plus à la mode et des plus courus de la ville. On doit son existence non pas à un vieux beaufard égrillard et libidineux mais à une gauchiste dreadlockeuse qui, fort courageusement et civiquement, interdit son bar aux « skinheads ». Une Lucie Aubrac de la limonade en quelque sorte... Les nichons à l'air en plus peut-être...

A moy que chault !