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O.N.G. - Extrême-orient(é)
6 avril 2012

Pound et l'importance de la culture chinoise

Sans titre

Jean-Jacques Brochier : En 1968, vous publiez un recueil d'articles, « Logiques », et un roman, « Nombres ». Est-ce une coïncidence avec les événements de Mai ?

Philippe Sollers - « Drame », que j'avais publié en 19635, était un roman du dédoublement, de la scission du sujet qui se capte en train de dérouler le fil de son langage et sa projection par écrit. C'était une mise en scène en 64 cases, comme le jeu d'échecs, du dédoublement du langage. « Nombres » s'est écrit en 66-67 et je voudrais insister sur le fait que s'y introduit déjà une marque fondamentale, celle de la Chine. Introduction qui, dans la culture occidentale, n'avait été pratiquée que par Ezra Pound. Pound avait d'ailleurs été traduit par l'un de nous, Denis Roche, qui avait su rythmer en français la très grande nouveauté formelle des « Cantos ». Mais si Pound est l'un des premiers occidentaux à se rendre compte de l'importance de la culture chinoise, de son altérité, il introduit la culture chinoise de façon classique. L'horizon de la culture chinoise pour Pound, c'est la grande culture impériale, qui se déroule, selon une périodisation immuable, dans un cadre différent de celui de la culture occidentale soumise au temps historique et à ses spasmes de renouvellement. Ce n'est un secret pour personne que si Pound, du point de vue formel, est d'une importance déterminante, son idéologie est réactionnaire et même explicitement fasciste. Ce qui est curieux c'est que Pound introduit le chinois dans ses poèmes au moment où se développe en Chine la révolution prolétarienne.

Magazine littéraire n° 65 - Juin 1972

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