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O.N.G. - Extrême-orient(é)
15 novembre 2010

Nationalisme éthnique et nationalisme politique en Corée

258N

Voici la conclusion du mémoire de recherche "Nationalisme ethnique et nationalisme politique en Corée. Une lutte d'un demi-siècle pour la définition de la coréanité" par Marjorie Carré pour le DEA "d"Analyse Comparative des Aires Politiques", Programme Asie, 2003-2004. Sous la direction de Christophe Jaffrelot (Science Po). Lisez l'intégralité (30 pages à peine) de ce mémoire très intéressant ici.

« Pour conclure, un mot doit être dit sur la diversité des appellations données à la Corée et aux Corée, tout à fait significative de la cristallisation autour de la problématique de la représentation légitime. En français et en anglais, c'est le terme « Corée » ou « Korea », issu du nom de la dynastie antique qui est utilisé. Cette appellation pourrait être qualifiée de neutre, puisque ni le Nord, ni le Sud ne l'utilisent. En effet, le régime du Nord a préféré le terme de « Choson », faisant référence à la dynastie médiévale qui régna sur la Corée sur plus de cinq siècles ; les déclinaisons de cette appellation sont « Choson du Nord » et « Choson du Sud ». Les Sud-coréens ont eux choisi le terme de « Hankuk », signifiant le pays des Han (l'ethnie Han), pour désigner le tout ; les déclinaisons sont « Han du Nord » et « Han du Sud ». Le Nord n'utilise jamais l'appellation « Hankuk » et réciproquement, le Sud ignore le nom « Chosun ». Cette attitude est très parlante : les deux pays utilisent un terme au symbolisme très fort, faisant directement référence à l'unité perdue... mais ils ne sont pas d'accord sur le choix de ce terme et, une fois encore, chacun tend à imposer sa représentation comme légitime.

Dans les relations inter-coréennes, le nationalisme ethnique et le nationalisme politique s'articulent de manière complexe, le premier fournissant le terreau sur lequel va se développer le second. Et la coexistence de ces deux types de nationalisme, l'un unificateur, l'autre source de division, ne fait que consolider des positions antagonistes, faisant sans cesse reculer la perspective d'une réunification. Aujourd'hui encore, le processus de réconciliation s'articule autour de la question de la représentation de la totalité de la communauté ethnique. Le Nord et le Sud entrent en concurrence pour imposer leur définition de la nation et pour conquérir la légitimité de sa représentation. Et c'est précisément parce que les deux entités revendiquent cette légitimité que le processus de réconciliation et, au-delà, de réunification est longtemps resté au point mort. Par ailleurs, la partition territoriale n'a pas atténué mais au contraire renforcé l'ethnicité comme source primaire d'identification pour les Coréens. De chaque côté, les discours n'ont cessé d'essentialiser la nation et ont ainsi défini une coréanité immuable et transcendante. La crise financière de 1997 et le sentiment d'humiliation nationale qu'elle a fait naître n'ont fait qu'accentuer cette tendance dans la partie sud, ce qui se manifeste notamment par un regain d'intérêt pour l'identité culturelle coréenne au sein de la population. »

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