Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
O.N.G. - Extrême-orient(é)
26 juin 2009

L'incroyable poursuite du SMS Enden

emden

À la déclaration de guerre de 1914, le SMS Emden, le dernier navire de combat allemand à posséder des machines à vapeur, eut une brève et remarquable carrière dans la guerre de course, en particulier grâce aux grandes qualités de son commandant, Korvettenkapitän (capitaine de corvette) Karl von Müller. Le bateau avait été baptisé selon la ville allemande d'Emden, sur la rivière Ems, qui avait sponsorisé la construction. Le 1er avril 1910, il fut affecté à l'escadre des croiseurs d'Asie, basé à Qingdao, une fois arrivé il gagna du fait de ses lignes élégantes le surnom de Cygne de l'est.

En mai 1913, il fut confié à celui qui devait être son dernier capitaine, Karl von Müller, et quelques mois plus tard, en août, il rejoignit une force multinationale composée d'anglais et de chinois qui réprimait une révolte chinoise sur le fleuve Changjiang.

La tension s'aggravant en Europe, von Müller, soucieux de la proximité des forces bientôt ennemies, décida de quitter Qingdao dès le 31 juillet 1914. Il était donc à la mer à l'ouverture des hostilités, le 4 août 1914, il s'empare de sa première prise de guerre, le vapeur russe Rjasan, qui une fois capturé est renvoyé à Qingdao, où il sera transformé en croiseur auxiliaire armé avec huit canons de 105 mm pris sur la canonnière Kormoran. La colonie allemande de Qingdao était entourée de fortes colonies alliées. Et le port en eaux profondes ne pouvait que les attirer sans possibilité de résister longtemps. Von Müller rejoint donc l'escadre de l'amiral Maximilian von Spee, le 8 août à l'île de Pagan dans les Mariannes. Il convainc l'amiral de lui laisser tenter sa chance en solitaire, contre le commerce britannique dans l'océan Indien.

Il part donc le 14 en compagnie d'un ravitailleur de charbon du charbonnier Markomannia, en direction des Indes orientales néerlandaises (Indonésie), où il est intercepté par le cuirassé hollandais Tromp qui le somme de quitter ces eaux neutres, il s'exécute et arrive dans l'océan Indien, qui à cet époque était souvent qualifié de lac britannique. Ce terrain rempli de gibier, lui est rapidement profitable, car le mois de septembre, il fait dix-sept victimes, quinze britanniques, qu'il expédie par le fond grâce à ses canons ou moyen de charge de sabordage, et deux neutres (un italien et un norvégien) qu'il relâche. Les équipages britanniques capturés sont bien traités et on s'assure de leur sûreté. Néanmoins, l'action de l'Emden sème la panique dans la navigation alliée, les primes d'assurance s'envolent et de nombreux navires de guerre s'activent à sa recherche. Le trafic marchand britannique est très réduit.

Pour dérouter celle-ci, von Müller fait installer une quatrième cheminée factice sur son bateau, pour rapprocher son allure de celle du britannique HMS Yarmouth. De nombreux capitaines de commerce alliés se laisseront prendre à la supercherie allant même jusqu'à saluer le navire qui venait les capturer. Le 22 septembre 1914, le croiseur allemand bombarde les réservoirs de pétrole de la ville de Madras en Indes, provoquant un incendie et une panique en ville.

Il renonce ensuite à attaquer le port de Colombo qui semblait déjà en alerte. Le 5 octobre, il fait escale à Diego Garcia possession britannique dont les habitants n'avaient pas encore eu connaissance de la déclaration de guerre pour des réparations, notamment de sa vedette de liaison et un nettoyage de quille par échouage sur une plage de sable comme le faisaient les navires à voiles en bois des siècles précédents. Le niveau du trafic marchand britannique s'étant rétabli, von Müller repart vers les îles Laquedives et coule dix nouveaux navires alliés. Il échappe aux navires de guerre alliés RMS Empress of Asia et HMS Hampshire en se réfugiant dans un grain près des îles Maldives et le 21 octobre, il se ravitaille en charbon aux îles Nicobar.

Les Alliés détournent de l'escorte des convois les croiseurs britannique HMS Yarmouth, russe Askold, japonais Tokiwa et Yakumo qui s'ajoutent au japonais Chikuma et au russe Zemchug. Le 28 octobre, avec sa 4e cheminée postiche, il pénètre à vive allure dans le port de Penang (Georgetown) en Malaisie, fait exploser le vieux croiseur russe Zhemchug, vétéran de la bataille de Tsoushima d'une seule torpille et canonne les autres navires à quai. La réaction de ceux-ci est désorganisée et provoque encore d'autre dégâts par tir fratricides, l'Emden fait alors demi-tour vers le large suivi par les contre-torpilleurs français, Mousquet, Pistolet et Fronde, mais armés chacun d'un seul canon de 47mm. L'allemand réduit alors le premier à l'état d'épave à coup de 105 mm et sème les deux autres.

L'Emden recueillit 36 rescapés du Mousquet qui comptait aussi 43 disparus. Il arraisonna le cargo britannique Newburn sans l'attaquer pour y transférer les prisonniers. Les navires japonais Yahagi, britanniques HMS Gloucester, HMS Weymouth, RMS Empress of Russia, SS Empress of Australia se joignent à la chasse.

Le 9 novembre tôt le matin, il aborde les îles Cocos pour y détruire la station de radio et le nœud de câbles sous-marins afin de perturber les communications alliées dans l'océan Indien. Von Müller envoie à terre une compagnie de débarquement de 38 marins et 6 officiers armés de fusils et de mitrailleuses sous le commandement du premier lieutenant Helmuth von Mücke. Les civils britanniques eurent le temps de lancer un SOS. Les allemands détruisirent les équipements. Le croiseur australien HMAS Sydney capta le SOS, rejoignit l'archipel à toute vapeur et coula le SMS Emden dans un combat inégal. Cependant, retardé à poursuivre le charbonnier Buresk ravitailleur du Emden, il ne put envoyer de compagnie à terre avant la nuit.

Dans l'intervalle, le lieutenant von Mücke commandant la compagnie à terre avait enfermé les civils britanniques. Mais constatant la perte de l'Emden, il s'empara d'un vieux voilier en mauvais état de 133 tonneaux l'Ayesha et le chargea en vivres et en eau potable. Le voilier avait normalement un équipage de 12 hommes, mais les allemands étaient au nombre d'une cinquantaine. Les allemands purent quitter l'île avec toutes leurs armes avant le jour. Ils disposaient seulement d'un vieux sextant et d'instructions nautiques de 1845. Malgré l'état délabré du bateau, le manque de vivres et d'eau potable, et un typhon, il franchit les 600 milles le séparant de Sumatra.

Le 27 novembre 1914, arborant le pavillon de la marine de guerre allemande, il atteignit Padang, dans les Indes orientales néerlandaises qui était un territoire neutre, mais qu'il dut quitter deux jours plus tard. Le 14 décembre, ils montèrent à bord du charbonnier allemand Choising et sabordèrent le vieux voilier. Le navire fut camouflé en tant que navire italien Sheniz.

Le 9 janvier 1915, ils atteignirent Hodeida dans le Yémen occupé par les Turcs alliés de l'Allemagne. Ils poursuivirent leur voyage par voie de terre en arrimant leurs 4 mitrailleuses sur des chameaux, mais se heurtèrent à des tribus révoltées alliées aux Anglais. Ou bien à bord de sambouk en cherchant à échapper aux navires alliés sur la mer Rouge. Le 6 mai 1915, ils atteignirent l'extrémité du chemin de fer et arrivèrent à Alep. Ils atteignirent Constantinople le 23 mai 1915 après un voyage épique. De là, ils regagnèrent l'Allemagne.

Le commandant von Müller reçut du Kaiser Guillaume II la Croix de Fer de première classe, bien que lui et les rescapés de l'Emden passent le reste de la guerre en captivité à Malte. Les survivants eurent aussi le droit de suffixer leur nom de famille par « -Emden ».

SMS_Emden
(cliquez)

Publicité
Commentaires
Publicité