Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
O.N.G. - Extrême-orient(é)
29 juin 2008

Prisonnier de guerre Japonais (5/5) - Le retour

59

Moi et mon ami (à la base étudiant en musique) composions toutes les nuits. Un jour nous avons donné à l'orchestre allemand quelques-unes de nos compositions. Nous ne nous comprenions pas mais pour la musique il n'y avait pas besoin de mots.

60

L'orchestre allemand jouant de la musique du lointain Japon. Un soldat japonais fit même une danse traditionnelle pendant la représentation. La joie nous emplissait le cœur, la date de notre départ se faisait proche.

61

Toutes les réunions avaient un goût du départ. Je me souviens d'une fille qui avait beaucoup de mal à nous voir partir. Pauvre Natacha, que fais-tu maintenant ? qu'es-tu devenue ?

63

Je pense que ce monde ne fait qu'un et que nous sommes pleins de similitudes. Tout le monde pleurait et disait "Adieu". Si nous ne comprenions pas le langage, lever la main et l'agiter suffisait pour se faire comprendre. Quand je repense à tout ce temps passé dans les camps de prisonniers ...

62

Contrairement à l'aller, les portes du train étaient grandes ouvertes. Dans ce coin du monde, la Sibérie, le soleil ne se couche pas entièrement et éclaire le ciel même la nuit. Les Russes appellent cela les "Nuits Blanches". Le long du transsibérien nous roulions toujours plus à l'Est ...

64

C'était difficile d'utiliser les toilettes dans le wagon, alors à chaque arrêt, tel des oiseaux sur leurs branches, nous laissions des "présents". (Cette tradition n'est pas une invention salasse du webmastre de ONG)

65

A la sortie du train à Khabarovsk, nous nous sommes fait attaquer par des représentants haineux du Parti Communiste Japonais. Nous revenions tout juste de goulags, c'était assez étrange.

66

Monsieur Abe, celui en charge, essaya de nous parler du communisme. Il nous avait d'ailleurs rendu visite lorsque nous étions dans le camp de Nakhodka, nous apprenant des chansons ... mais nous n'en avions rien à faire.

67

Même conquis, notre pays restait joli. Les îles japonaises, les arbres qui bourgeonnaient, le port de Maizuru ; nous avions les larmes aux yeux. Un criât "Hourra!". Certains des soldats n'étaient pas rentrés depuis 10 ans.

68

Nous foulions enfin notre sol natal, nous entendions le bruit de nos pas sur notre terre. Ceux venus à notre rencontre criaient, nous remerciaient, nous serraient la main. Les infirmières de la Croix Rouge Japonaise, toutes en blanc, se prosternaient respectueusement.

69

Nous avons d'abord visité la douche. Nous nous disions tous que c'était "excellent", voire même que "rien ne peut être aussi bon!". Après avoir été désinfectés au DDT, nous nous sentions de nouveau comme de vrais Japonais.

70

Nous faisions des galipettes et roulions dessus, "Saint Tatami!". J'étais tellement heureux... ce n'est qu'à partir de ce moment là que j'ai réalisé que j'étais enfin à la maison.

76

Le train arriva en gare de Kusanagi (dans la province de Shizuoka). Mon plus jeune frère arriva en courant, m'appela et me regarda, fixement, descendre du train. Mon père vint à son tour "Est-ce toi Nobuo ?" "Oui". Il était tellement ému qu'il ne sut me dire que "Je suis tellement heureux..."

Kiuchi Nobuo (retraité de l'armée de l'air japonaise)

Publicité
Commentaires
Publicité